Le Code du travail français est sur le point de connaître des changements significatifs en matière d’acquisition de droits aux congés payés, par suite des arrêts du 13 septembre 2023 de la Cour de cassation, dans lesquels la Haute Juridiction améliore les droits des salariés aux congés payés afin de se mettre en conformité avec le droit de l’Union européenne.
Aujourd’hui, un collaborateur n’acquière pas de congés payés durant un arrêt pour maladie non professionnelle, tandis qu’un collaborateur en arrêt maladie d’origine professionnelle acquiert cinq semaines de congés payés par an dans la limite, toutefois, d’une année d’arrêt. Au-delà, l’arrêt maladie ne permet plus d’acquérir de jours supplémentaires.
Cette absence de provision est appelée à changer prochainement.
Le 15 mars 2024, le Gouvernement Attal a en effet déposé un amendement au projet de loi d’adaptation au droit de l’Union européenne, en vue de mettre le code du travail en conformité avec le droit européen en matière d’acquisition des droits à congés payés pendant les arrêts de travail. Le texte de l’amendement gouvernemental colle à l’avis publié par le Conseil d’État le 13 mars 2024.
La prochaine étape est la Commission Mixte Paritaire prévue mi-avril, pour tenter de trouver un compromis sur l’ensemble du projet de loi d’adaptation au droit de l’Union Européenne. En cas d’accord, l’adoption définitive par l’Assemblée Nationale et le Sénat aura lieu dans la foulée.
En résumé :
Acquisition de congés payés pendant les arrêts maladie, la future nouvelle règle
L’amendement du Gouvernement contient deux grandes mesures :
- Les salariés en maladie d’origine non professionnelle vont acquérir des congés payés, dans la limite de quatre semaines par an (2 jours/mois).
- Les salariés en maladie d’origine professionnelle vont continuer à acquérir des congés payés, dans la limite de cinq semaines par an (2,5 jours/mois). En revanche, la limite stoppant l’acquisition de congés payés au bout d’un an sera supprimée : dans ce cas, l’acquisition des congés payés se poursuivra donc même au-delà d’un an.
Pour adapter la réduction du nombre de jours de congés payés acquis en cas de maladie ou d’accident ayant un caractère non professionnel au calcul de l’indemnité de congés payés selon la règle du dixième, l’amendement prévoit que ces périodes seront considérées comme ayant donné lieu à rémunération dans la limite de 80 %.
Congés payés en arrêt maladie : une rétroactivité limitée
Les nouveaux droits des salariés seront applicables pour la période courant du 1er décembre 2009 à la date d’entrée en vigueur de la future loi.
Toutefois, pour la même période, les congés supplémentaires acquis par application de la nouvelle loi ne pourront, pour chaque période de référence, excéder le nombre de jours permettant au salarié de bénéficier de 24 jours ouvrables de congés, après prise en compte des jours déjà acquis, pour la même période, en application des dispositions du même Code dans leur rédaction antérieure à la future loi.
Un report maximal de 15 mois
Lorsqu’un salarié se trouvera dans l’impossibilité, pour cause de maladie ou d’accident (professionnel ou non), de prendre, au cours de la période de prise de congés, tout ou partie des congés qu’il aura acquis, il bénéficiera d’une période de report de 15 mois afin de pouvoir les utiliser, à compter de la date à laquelle le salarié recevra, postérieurement à sa reprise du travail, l’information individuelle relative à ses droits (cf.infra). Passé cette période de report, les jours acquis non pris seront éteints.
Toutefois, pour les congés payés acquis durant les périodes d’arrêt, la période de report débutera à la date à laquelle s’achève la période de référence au titre de laquelle ces congés ont été acquis si, à cette date, le contrat de travail est suspendu, en raison de la maladie ou de l’accident, depuis au moins un an. Dans ce cas, lors de la reprise du travail, la période de report, si elle n’a pas expiré, sera suspendue jusqu’à ce que le salarié ait reçu l’information individuelle relative à ses droits (cf.infra). Les droits à congés s’éteindraient donc définitivement au terme de ce délai, même si le salarié est toujours absent et que l’employeur n’a pu l’informer de ses droits en raison de la suspension du contrat.
Un accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche pourra fixer une durée de report supérieure.
Une obligation d’information
À l’issue d’une période d’arrêt de travail du salarié pour cause de maladie ou d’accident, l’employeur devra porter à la connaissance du salarié dans les 10 jours qui suivront la reprise du travail, les informations suivantes par tout moyen conférant date certaine à leur réception : le nombre de jours de congé dont il dispose et la date jusqu’à laquelle ces jours de congé peuvent être pris.
Une forclusion de 2 ans et une prescription de 3 ans
Toute action en exécution du contrat de travail ayant pour objet l’octroi de jours de congé par application des dispositions de la nouvelle loi devra être introduite, à peine de forclusion, dans le délai de 2 ans à compter de la date d’entrée en vigueur de loi. Les salariés encore présents dans les effectifs de l’entreprise auront donc jusqu’en 2026 pour réclamer des congés qui auraient dû être acquis au cours de périodes d’arrêt maladie depuis le 1er décembre 2009.
Quant aux salariés ayant déjà quitté l’entreprise, la prescription triennale s’appliquera à l’action en justice (3 ans après la rupture du contrat de travail, pour les 3 années antérieures à la rupture), ce qui empêchera, de fait, les actions de salariés ayant quitté l’entreprise depuis plus de trois ans.
En conclusion, ce droit à acquisition de congés payés durant les arrêts pour maladie non professionnelle représente à la fois un alignement sur la législation européenne et un compromis qui prend en compte les préoccupations économiques des entreprises.
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